J’ai pensé à un projet de thèse. Ca s’appellerait : « Bouleversement des normes et déséquilibre relationnel dans les relations amoureuses, l’idéologie à l’œuvre dans la variété française du vingtième siècle ». D’un côté, il y a le queutard, qui dit : arrête de faire ta chochotte, même si je te trompe, j’ai besoin que tu sois là, j’ai besoin de m’appuyer sur toi comme une béquille, parce que tu es bien gentille et que tu prends soin de moi avec dévotion. Quand t’es pas là, il n’y a plus personne pour m’aimer. Alors viens je nique des meufs, je t’aime bien, et tant que j’ai besoin de m’appuyer sur toi, tu restes.
C’était le résumé de l’article sur la chanson de KeBlack (mon chanteur préféré après Benjamin Biolay, le roi des faux-futurs suicidés). Ces mecs-là, ma cousine les appelle les « takers». Parce que ça a un nom en anglais en plus !
Donc, un mec ça ment, comme ci-dessus ca mène une double vie, nous on aime avec dévotion, et on s’occupe de lui, comme à suivre ci-dessous. Voilà voilà.
Grosse grosse propension des meufs à être des serpillères qui n'envisagent contre toute attente, pas de vivre sans le queutard. D’où le titre de l'article. J’ai ré-entendu une vieille chanson d’Axel Red. Depuis toujours, je croyais qu’elle disait « MAIS LAISSE-MOI, RESTE ET PARS ! ». Une folle. Antithèse de folle. Mais pourquoi pas. Cependant, révélation : elle ne dit pas « laisse-moi, reste et pars ». Non. Elle dit « Laisse-moi rester femme ». Elle supplie, elle lâche tout. Fini le quotidien chiant (parce qu’elle est chiante hein), et son envie d’être en couple stable, de se tenir au courant de la vie du mec. Elle lâche sa personnalité, sa dignité, ses envies, ses habitudes, le spectre entier de son identité. Pour qu’en échange, il la laisse rester femme. Allez.
Petite question : ça veut dire quoi rester femme ? Hypothèse 1 : ça veut dire, viens on fait encore du sexe ; rester femme, c’est conserver sa sexualité avec le partenaire. Hypothèse 2 : ça veut dire, viens on dirait que tu restes pseudo en couple avec moi, comme ça je ne suis pas seule au monde, et je conserve mon identité. Rester femme serait : se tenir complète, tenir debout, empêcher que le sentiment d’existence ne vole en éclat, parce qu’il n’y aurait plus d’homme pour renvoyer l’image de son existence.
Mini-tour d’horizon de la dépendance affective, autrement appelée : je veux être de l’ombre de l’ombre de ton chien quoi qu'il arrive reste à côté de moi : « Faut-il que je saigne, pour qu’il m’aime aussi, pour ce que je suis », de je sais plus qui. La réponse est : oui, au moins. Essaye toujours, ça a l’air d’être une bonne idée. « Je ne sais plus comment t’aimer, ou comment te garder » Natasha Saint Pierre, autrement dit : que te donner de plus pour que tu restes ? Mon sang ? Je suis O négatif. Inspiration la chanson d’avant.
Alors le fond de tout ça, c’est la peur terrifiante que personne ne nous aime, la peur panique de ce qui arrive quand on est seule : comment on « tient » notre identité, qui va valider notre existence, nous trouver mignonne, nous faire un câlin, nous faire exister en nous donnant de l’attention ? Que faire de toute cette liberté, de tout cet espace, juste pour nous ? Je suis vieille, peut-être serai-je seule toute la vie, or la vie seule est triste, donc ma vie sera nulle ; je devrais faire un effort pour avoir un vrai couple, peut-être que c’est ma faute, je devrais être moins sensible. Bla bla bla bla.
FLASH INFO : Non non non. Vous je ne vous connais pas, mais moi je suis cool, je suis un éducateur, je suis aimante, compréhensive, patiente, travailleuse, dure à la tâche, j’aime le sexe, et je suis bien meilleure que toi quand c’est connecté (le sexe, c’est toujours pas du fitness en levrette, deuxième flash info). Le fail vient des interactions que j’ai choisi de conserver. Récemment j’ai réalisé que je n’aurais pas pu faire mieux avec ce que j’avais, comme partenaire. Je n’aurais jamais pu construire quelque chose d’harmonieux, un couple heureux, avec les interactions que nous avions. Voilà c’est tout.
Je prends ma part de responsabilité. J’ai pu m’engager alors que je voyais que ça n’allait pas. J’ai pris un mec qui m’aimait pas, pour lui courir après, et un autre qui m’aimait pour tenir la distance. En même temps. J’ai essayé avec beaucoup trop d’entre vous. J’ai trop forcé quand ça n’allait pas, j’avais une peur panique d’être seule. Néanmoins, je me suis barrée A CHAQUE FOIS quand même, avec un déluge d’angoisses violentes et d’envies de mourir derrière. Donc déjà, je suis pas une faible. J’ai décidé de ne plus m’engager dans rien, si ce n’est pas un amour évident, harmonieux, qui donne des rigolades et des enfants. Un truc qui roule, une Ferrarri qui roule toute seule sans lutte. Sinon, je ne peux pas faire mieux, quand c’est bancal c’est bancal. Dossier caca, dossier caca.
Ca y est j’ai compris mes limites (que doit-on endurer pour être aimé ?). Je ne tolère pas/plus, parce que j’étais championne : la dévalorisation, la violence psychologique, la manipulation, la relation-compagnie sans amour, la relation d'amour sincère sans partenariat ni intimité. Et le prochain qui me dit « trouve toi un vrai mec », « les filles violées l’ont cherché », « tu n’es pas généreuse, tu dois te mettre en levrette quand je le demande, même si tu n’as pas de plaisir, c’est ça les couples! Tu n’auras jamais de mec en restant comme ça, tu es trop égoïste », « ou j’ai pas le temps à t’accorder pendant tiuon IVG, je déménage » je le prends et je le mets dehors fermement. Ca sort de la zone. C’est moi qui décide de la place que je leur laisse. Il y a : être respectueux et bon, et ça nous élève et ça nous épanouit, ou tu sors. Je me débrouillerai avec toute cette liberté et toute cette solitude qui m’arrivera à la gueule. Y’a matière à en faire quelque chose une fois la panique passée. Et sinon, ça ne donnait rien de bien de toute façon.