dimanche 23 juin 2013

Episode 24, Saison 3

Boris s’est fait un site pour vendre ses toiles, et il y a une petite vidéo de lui dans son atelier dessus. Epiphanie ! C’est la soixante-douzième. Je vais tellement lentement. Et encore, je ne vous ai pas raconté tous mes rêves intermédiaires, durant la reconstruction. 
J’ai rêvé qu’il revenait. Je le reprenais avec tellement de joie, c’était inespéré, mais j’avais un léger doute. J’en avais eu tellement envie, je ne pouvais pas me permettre de dire non. Un autre rêve. Il revenait. J’en avais pas du tout envie. Mais on parlait comme avant et on restait copains. Mon cerveau sait ce qu’il fait, il travaille lentement, mais il travaille. 
Si je vais lentement aussi, c’est qu’entre temps, j’ai des trous noirs de travail. J’oublie que je peux avoir des mecs –pas de rendez-vous depuis les dernières vacances : j’ai pas le temps, mon esprit vire ailleurs-, que j’ai une existence en dehors de la survie, survie qui consiste à savoir ce que je vais faire au prochain cours, et guérir laborieusement de tout ce que je peux attraper (rame, rame, ramons, ramez…). 
Bref. Je l’ai vu en vidéo, la même tête que d’hab, avec cet air légèrement gêné. J’ai ressenti cette fameuse envie de le secouer, en agrippant ses épaules, et de lui dire « COME ON » (oui je suis bilingue biatch). T’as l’air d’avoir avalé une grosse boulette de wasabi, mais tu veux le dire à personne. Il y a un truc à percer. Lâche tout. Viens, on s’amuse, on crie, on fait un truc ! Julie te balancerait une vanne dans la face, tu ne saurais plus où t’habites. 
Avec la FIWB (Fédération Internationale de Water Basket, sport inventé en vacances, qui consiste à emmerder toute la plage, se sauter dessus, se faire des bleus, égratigner l’arcade de Djami, et couler Mélanie. J’ai trop hâte qu’on recommence), on se vanne c’est violent (les témoins témoignent). Moi c’est exactement là que je m’amuse, et que j’ai l’impression de faire quelque chose qui vaut le coup. 
Avec Boris, on n’avait vraiment rien à faire ensemble ; je le savais ; mais je l’ai compris, vraiment intégré, il y a un quart d’heure. L’association me paraît improbable, et désagréable. Jackie Chan versus un mec d’apparence chelou qui a besoin de calme (il est un peu comme mon petit autiste en quatrième, il lui faut un environnement tellement calme et du temps pour s’épanouir, on a essayé de lui créer ça cette année). Mais moi j’attends juste que ce soit électrique, violent. Tout en restant dans le respect de l’autre et l’amour du prochain bien entendu. Cela exclut donc d’emblée le mec qui ressemblait à Medhi de La belle et ses princes qui m’a pincée tellement fort que j’ai passé une semaine à croire que j’avais une tumeur là où il m’avait pincée ce bâtard –j’avais juste un bleu. Je suis assez attaquée comme ça, il faut faire attention à moi. Mais lui, le khmal, c’était un malade. Trop de bagarre pour moi. Je prends déjà le noctilien, j’ai mon quota. 
 Vous comprenez maintenant, que face à trente élèves dont le cerveau carbure à mille à l’heure et qui veulent me coincer (ce sont des élèves, c’est normal, ils veulent nous mettre notre race), le boulot est vraiment électrisant. Tout va vite, tout est plus violent. Toujours plus de vannes, toujours plus d’émulation.
 Encore un pallier de franchi : je me suis aperçue tout à l’heure que je n’ai pas du tout envie de lui parler un jour.